Comment réagir à la dépression d’un proche ?

La dépression modifie les relations de la personne avec son entourage, ce qui peut entrainer :
—–un bouleversement des repères familiaux,
—– une dégradation des relations,
—– une souffrance des proches.

Néanmoins, le soutien de l’entourage est un facteur de protection. Un entourage présent et soutenant participe à l’amélioration de la maladie.
Les proches sont donc essentiels dans le parcours thérapeutique de la personne souffrant de dépression.

Or, ils sont souvent les grands oubliés des prises en charge. Ils ne savent pas toujours quelle attitude adopter et se retrouvent fréquemment démunis.
Dans cet article, je souhaite te parler de ce qui peut te permettre d’accompagner au mieux ton proche atteint de dépression.

📊 La dépression est un véritable enjeu de santé publique.
Au cours de la vie, la dépression est susceptible de toucher environ 1/6 homme et 1/4 femme.


Quel impact de la dépression pour l’entourage ?

Depuis longtemps, les chercheurs ont démontré le lien entre la souffrance psychique d’une personne et celle des membres de sa famille.
Que la personne souffre en raison des conflits familiaux ou que la souffrance familiale provienne des symptômes de la personne, l’ensemble du groupe familial est confronté à la dépression.

Quel que soit les symptômes dépressifs de l’individu, sa famille souffre avec lui. L’entourage et l’individu partagent des sentiments :
de tristesse
d’impuissance
de culpabilité

La tristesse est inhérente à la dépression, elle est même sa composante principale. Elle infiltre toutes les sphères de la vie de la personne, incluant ses relations aux autres.

L’impuissance touche aussi bien la personne, qui est dans l’incapacité de percevoir un avenir meilleur, que ses proches, qui ne savent comment aider la personne à retrouver la pulsion de vie qu’elle a perdue.

La culpabilité est, elle aussi, présente des deux côtés. L’individu s’en veut de faire souffrir son entourage. Les proches cherchent le rôle qu’ils auraient pu tenir dans l’apparition de la maladie. Or, la dépression n’est jamais liée à une unique cause, elle est issue de multiples facteurs.

« La tristesse vient de la solitude du coeur. »

Charles de Montesquieu

Qu’est ce que la dépression ?

Des études démontrent que l’entourage est moins touché psychologiquement lorsqu’il comprend que les attitudes de son proche sont dues à la dépression et non à sa personnalité.
Ainsi, expliquer les implications de cette pathologie fait naître en lui des sentiments d’espoir et d’empathie.

Dans ce chapitre, je vais donc prendre le temps de t’expliquer ce qu’est la dépression. Si tu as déjà des connaissances sur ce trouble, alors file au chapitre suivant !

⚠️ Se sentir triste, avoir « la flemme » ou des soucis de sommeil ne signifie pas obligatoirement souffrir de dépression. Ces sentiments font partie de la vie. La tristesse et la douleur sont des émotions humaines normales.
Il ne faut pas confondre ces moments de « déprime » avec le diagnostic de dépression.

Le terme de dépression ne s’emploie pas à la légère.
Pour poser le diagnostic, cela nécessite plusieurs symptômes spécifiques qui doivent :
—– ⇨ générer une souffrance importante et inhabituelle
—– ⇨ se manifester :
————– depuis au moins 15 jours,
————–quasiment chaque jour,
————–presque toute la journée.

La 3 symptômes principaux

Les émotions et les pensées d’une personne dépressive sont marquées par une souffrance permanente.
Cette douleur est plus désagréable que toutes les autres que l’individu a déjà connu. Elle est une véritable rupture dans la vie de la personne. Elle le coupe de son fonctionnement habituel, mais aussi de son entourage.

Dans la dépression, deux autres symptômes s’associent à la souffrance :
—- une tristesse qui semble envahissante, inapaisable et incompréhensible, elle ne semble pas directement reliée à une cause.
—-une perte d’intérêt et de plaisir pour tout ce qui passionnait l’individu auparavant. Tout semble terne, sans importance et sans signification.

Les symptômes spécifiques

Ces symptômes sont durables et sont présents dans différents domaines de la vie quotidienne :
———- La vie affective
———-Le fonctionnement intellectuel
———-Le fonctionnement physiologique

La vie affective :
Hypersensibilité / Anesthésie affective : les personnes souffrant de dépression peuvent réagir avec excès ou bien, à l’opposé, avoir la sensation de ne plus éprouver d’émotions.
Sentiment d’abandon, d’inutilité et de solitude : les personnes ont le sentiment de ne pas être aimées, de n’avoir rien à dire d’intéressant, de ne plus être dignes d’intérêt.

Le fonctionnement intellectuel :
Difficultés intellectuelles : il est difficile de réfléchir, de s’adapter et d’accomplir des tâches qui paraissaient naturelles auparavant. Ces manifestations sont liées à une diminution de l’attention, de la concentration et de la mémoire.
Dévalorisation de soi : la personne se sent incapable, se pense sans valeur. Il lui est difficile de demander de l’aide et de croire qu’un traitement peut changer sa condition.
Pensées négatives : la personne analyse ce qui l’entoure sous un angle systématiquement négatif. Cela peut aller jusqu’à des pensées autour de la mort.

Le fonctionnement physiologique :
Fatigue : la sensation de manque d’énergie se mêle au découragement. Cela s’accompagne d’une altération du sommeil, la fatigue dépressive ne cesse pas avec une bonne nuit de sommeil. L’appétit est également perturbé, les aliments semblent insipides et cuisiner apparaît comme une corvée.
Ralentissement : les émotions, les pensées, la parole et les gestes sont ralentis par la maladie.
Symptômes physiques : des douleurs comme des maux de tête ou des soucis digestifs peuvent apparaître.

☝🏼 N’oublie pas d’expliquer la dépression aux aux gens qui t’entourent car beaucoup de conflits ou de ruptures proviennent de la méconnaissance de ce trouble.

La dépression ne se résume pas à la tristesse, elle est un ensemble complexe de symptômes.
Contrairement aux stéréotypes, elle n’est ni une fatalité, ni une preuve de faiblesse. Elle peut toucher chacun de nous à un moment de la vie.

La volonté n’est pas suffisante pour s’en sortir, entre autre car cette maladie implique des pensées négatives et une dévalorisation de soi.
Le rôle de l’entourage prend alors tout son sens dans la prise en charge.

« La dépression frappe au hasard : c’est une maladie, pas un état d’âme. »

Tahar Ben Jelloun

Que dire, que faire quand son proche est en dépression ?

La dépression est douloureuse pour la personne qui la vit, mais également pour les gens qui l’entourent. Deux raisons expliquent cela :
—— ⤳ la dépression est un trouble difficile à comprendre pour quelqu’un qui ne l’a jamais vécue.
—— en tant que proche, il est compliqué de trouver une « juste place » pour venir en aide au mieux.

Quelle attitude adopter ?

——– La compréhension

Il est important que tu gardes à l’esprit que la dépression est une maladie et non un choix de la personne. Cela passe, notamment, par l’apprentissage des symptômes, des causes et des traitements possibles.

Comprendre c’est aussi intégrer qu’il est extrêmement difficile de guérir d’une dépression.
Il te sera alors beaucoup plus facile de tolérer la situation et d’accepter les rechutes dépressives, qui font malheureusement partie intégrante de la maladie.

Les interprétations sur ce qui a provoqué la dépression sont souvent très éloignées des causes réelles du trouble. Plutôt que de perdre un temps précieux à te demander « pourquoi ? », concentre-toi sur l’acceptation de la situation et demande-toi « comment ? » aider au mieux.
La compréhension se centre surtout sur le « comment ? » plutôt que sur le « pourquoi ? ».

——– La bienveillance

Un soutien efficace suppose le respect d’une « juste distance », c’est-à-dire une présence bienveillante mêlant affection, écoute et patience.
Néanmoins, il n’est pas question de devenir « étouffant », au risque d’infantiliser ton proche, de participer à la dévalorisation de lui-même, et de le rendre dépendant de ton aide.

Cette attitude passe par :
—- Une ouverture à la discussion. Même si la personne a tendance à ressasser, à se répéter ou à rester sourd à tes mots réconfortants, il est essentiel de toujours est disponible pour l’écouter.
—- Une valorisation de ses efforts. Que ce soit par la parole, par un geste ou un sourire, il est essentiel de mettre en valeur chaque amélioration.
—- Des petites attentions particulières. Cela ne pourra qu’être bénéfique, même la personne ne montre pas l’enthousiasme que tu attendrais. Cette indifférence une manifestation de la dépression, et non pas un manque de reconnaissance.

——– L’empathie

L’empathie est la capacité à s’identifier à quelqu’un dans ce qu’il ressent. Cela implique de rassurer ton proche en lui disant que :
————– tu comprends ses difficultés,
————– tu ne le penses pas fou,
————–c’est une maladie qui touche des milliers de personnes,
————– l’on peut s’en sortir avec de l’aide et du temps.

⚠️ Il n’est en aucun cas question de brusquer la personne pour qu’elle « se bouge ».
L’empathie c’est, avant tout, avancer AVEC et non pas CONTRE la personne.

Une attitude empathique exclue tous les reproches et les « bons » conseils, tels que « Secoue-toi ! », « Bouge-toi un peu au lieu de ruminer », « Fais un effort, c’est juste une question de volonté », « Si j’étais toi, je ferais… », « Tu as tout pour être heureux », etc…
N’oublie jamais que la dépression est une maladie. Il ne te viendrait jamais à l’esprit de demander à une personne atteinte d’une intoxication alimentaire d’arrêter de vomir.

Les effets de ces conseils ou reproches sont contre-productifs. Si la personne n’a pas l’énergie d’y répondre positivement, ils vont accentuer la dévalorisation de soi et le sentiment d’impuissance.
La personne se sentira comme incomprise, elle aura l’impression que sa souffrance n’est ni entendue, ni reconnue.

Ces effets négatifs peuvent alors aggraver la symptomatologie dépressive et peuvent favoriser des idées suicidaires.

——– L’observation de son comportement

Les symptômes de la dépression n’apparaissent, généralement, pas brutalement. Il y a une dégradation progressive de l’état. Mais la personne peut avoir tendance à minimiser l’ampleur de sa souffrance. L’entourage est alors un regard extérieur plus à même de reconnaître l’apparition du trouble dépressif.
L’entourage proche est fréquemment celui qui s’aperçoit que quelque chose ne va pas.

Cette observation porte sur les évolutions du comportement par rapport : 
—- à la personne elle -même : apparence, appétit, sommeil, humeur, etc…
—- aux autres : repli sur soi, irritabilité, baisse ou reprise des sorties, etc…
—- à la vie quotidienne : les tâches domestiques, son envie d’aller travailler ou d’entreprendre des loisirs, etc…

Alors, sois attentif aux évolutions que tu observes.
Mais, ne te contente pas de les penser, parle-en à ton proche que ce soit positif ou négatif. Un retour positif est un encouragement, quand un retour négatif est un signal d’alerte.

Puis, quand votre proche va mieux, laisse-le tranquillement reprendre son rythme et la place qu’il occupait avant la maladie.


Quelle aide proposer ?

——– Proposer des activités et des sorties

Tu peux soutenir ton proche en l’invitant à faire des activités et des sorties ensemble.

Ne te soucie pas si elle refuse tes propositions. Le simple fait de la solliciter lui permet d’exister et de garder sa place. Et puis, peut être, qu’un jour la réponse sera positive, qui sait ?

Mais, attention, il peut être complètement contre-productif de brusquer ton proche en lui proposant sans cesse de faire des choses. Une personne souffrant de dépression se fatigue très vite car elle lutte en permanence contre sa fatigue et ses idées noires.
Il est donc question d’être à l’écoute de ses besoins et de ses envies.

——– L’accompagner dans ses démarches

La maladie implique souvent de nombreuses démarches : arrêt maladie, mi-temps thérapeutique, mutuelle, employeur, etc… Ton proche peut avoir besoin d’un petit coup de main !

Mais il essentiel d’éviter d’être envahissant et de vouloir tout gérer à sa place.
Sinon, elle aura l’impression d’être infantilisée ce qui va accentuer la dévalorisation et la perte d’estime de soi. Je l’ai déjà évoqué, mais là encore, le respect de la « juste distance » est primordial, même si celle-ci peut être difficile à trouver.

——– Lui proposer de consulter un professionnel

Même si les symptômes sont assez bruyants, la personne concernée par la dépression a souvent du mal à les repérer.
Ainsi, si tu observes chez un de tes proches les signes de dépression, il est essentiel que tu l’encourages à consulter. L’entourage ne peux remplacer les soignants pour repérer la dépression mais il joue un rôle de facilitation dans prise de contact avec eux. 

Pour une personne qui souffre de dépression, les choses simples peuvent sembler insurmontables. Il y a souvent un écart entre ce qu’elle accepte de faire et ce qu’elle va réellement faire.
—– ⤳ Si elle est d’accord pour consulter,
———alors il sera peut être nécessaire que tu appelles toi-même pour prendre le rendez-vous.
—– ⤳ Si elle est dans refus total,
———alors n’hésites pas à lui faire part de ton ressenti et de tes inquiétudes.

Au-delà du diagnostic, consulter un professionnel permet de mettre en place une psychothérapie et/ou un traitement médicamenteux.
Ton proche aura alors encore besoin de toi ! Il est nécessaire que tu crois en sa capacité d’aller mieux, même si les résultats peuvent mettre un peu de temps à être visibles.

⚠️ Si tu as des doutes sur la prise en charge, n’hésites pas à contacter le professionnel en question.

L’efficacité d’une prise en charge thérapeutique repose en premier lieu sur la relation.
Si le patient ne se sent pas en confiance avec le professionnel, alors n’hésites pas à lui soumettre l’idée d’en changer. Cela ne remet pas en cause les compétences du médecin ou du psychologue et c’est une décision qui peut être réellement bénéfique pour ton proche.


Et quand cela devient trop difficile, que faire ?

Ton soutien est indispensable mais il demande force et courage.

Il est normal que tu ressentes de la fatigue et du découragement. Avec le temps, ces sentiments risquent d’évoluer en colère et d’avoir un effet négatif sur votre relation. 
Pour cette raison, il est indispensable que tu te préserves !

Quelques conseils pour éviter l’épuisement :
——-Continue d’avoir des activités qui te procurent du plaisir et du bien être, elles te donneront le sourire et la force dont ton proche a besoin.
——-N’oublie pas ta propre souffrance, il peut être nécessaire que tu fasses appel toi aussi à un profession pour te soutenir.
——- Ne prends pas pour toi ce que ton proche dit, il peut prononcer des paroles blessantes, car il est dans une grande souffrance.

Tu n’es pas la solution miracle à la dépression de ton proche !
Garder cette phrase en tête est nécessaire pour ne pas culpabiliser de ton impuissance. Tu ne peux pas avoir une réaction parfaite à chaque fois, tu es et reste humain.

🌸 Cet article propose des pistes de réflexion concernant l’attitude et l’aide à adopter. Mais, il peut être incomplet et ne pas correspondre à certaines situations.
Il serait intéressant, si toi-même tu es dans cette situation, que tu complètes ces propositions dans les commentaires.

« Les mots gentils peuvent être courts et faciles à dire, mais leurs échos sont vraiment infinis. »

Mère Teresa

Bibliographie

Frank Bellivier & Emmanuel HaffenActualités sur les maladies dépressives. Lavoisier, 2018
Michel GoudemandLes états dépressifs. Lavoisier, 2010
https://www.la-depression.org/

Une réflexion au sujet de « Comment réagir à la dépression d’un proche ? »

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